jeudi, avril 14 2016

Bonnes Pratiques pour animer un espace de Coworking

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En Janvier 2012, en marge de la rencontre des acteurs de l'internet Autrans 2012, nous avons effectué une rencontre en ligne sur les bonnes pratiques pour animer un espace de Coworking. Quatre (4) ans après, les récommandations que nous avons co-rédigées, continuent de résonner à mes oreilles comme des commandements. J'ai donc décidé ce matin de les publier à nouveau. La première version avait déjà été publiée sur le blog du réseau Afriworkers.


Recettes (accueil, règles communes, animations)

Les recettes dont les grands traits restent l'accueil, les règles communes et l'animation proprement dite, ont été le premier sujet abordé. Il ressort des échanges que les premiers ingrédients sont la convivialité, la construction collective et la bienveillance. Tout projet d'espace de coworking passe nécessairement par l'édification d'une communauté. Il faut d'abord s'occuper de la communauté avant de s'occuper de l'espace en lui-même. L'organisation des événements, des rencontres, des conférences et aussi d'excellentes compagnes publicitaires permettent de bâtir une communauté autour du projet d'espace de Coworking en identifiant les centres intérêts. Les « success stories » de quelques espaces de coworking doivent idéalement servir d'exemples pour une meilleure orientation. L'accueil des coworkers dans l'espace de coworking doit susciter une attention particulière. Ce volet pourrait même être confié à une cellule d'accueil, de prise en charge et d'orientation des nouveaux membres.

Réussites / échecs : Les trucs à éviter

C'est vrai que chaque projet d'espace de Coworking se nourrit des réalités du territoire d'accueil mais il est clairement prouvé que certaines règles restent communes. Voici quelques règles évoquées lors des échanges pour réussir son projet d'espace de Coworking :

  • Se lancer à l'eau et apprendre à nager. Il est conseillé de commencer petit et gravir les échelons en ayant en visuel les succès de quelques espaces de Coworking

  • Tout doit s'établir sur la base de proposition et non d'imposition stricte aux coworkers. Cela n'exclut pas la mise en place d'un guide du coworker renfermant les règles d'usage et les habitudes de l'espace

  • Toujours réserver un temps de partage de compétences, d'expériences pour permettre réellement à la communauté de mieux s'exprimer

  • Des litiges peuvent intervenir entre des coworkers. L'esprit communautaire exige que tous les coworkers s'impliquent dans le règlement de ce diffèrent. Chaque coworker, membre de l'espace devient un facilitateur

  • Le succès des espaces de Coworking est basé sur l'esprit de collaboration et non de compétition. On aspire plus à un partage d'expérience, de connaissance et une mutualisation des compétences.

Les échecs des espaces de Coworking proviennent du fait de ne pas se lancer. La peur d'échouer mène naturellement à l'échec. Une autre cause de l'échec est de croire qu'il est simple de collaborer et de partager. Le partage, la collaboration et la mutualisation demandent du temps, de la patience, de l'engagement et du don de soi.

Un facteur de durabilité du Coworking est la mise en place d'une politique de survie.

Les rôles des membres et intelligence collective

Le dénominateur commun de tous les espaces de coworking est la communauté. Une communauté forte et vivante bâtie sur une intelligence participative et collective. Le membre est désormais celui-là même qui concilie son propre développement et celui de sa communauté (intérêts communs, croisés et liés). En plus d'être l'ambassadeur de sa communauté en allant à la rencontre des territoires et des entreprises, le membre n'est plus un client mais une intelligence qui participe tant à la vie économique que sociale de l'espace de coworking. Ce qui fait de lui un potentiel animateur de la communauté selon son domaine de compétences, son expertise et son expérience.

C'est ainsi que l'espace de Coworking gardera pendant longtemps sa réelle valeur ajoutée.

lundi, juillet 28 2014

OuagaLab, un FabLab …. mais aussi une histoire !

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Nous sommes au soir de la 3ème édition d 'Innovafrica, le forum de l'Innovation africaine, et les lampions s’éteignent sur la ville de Ouagadougou. C'est la fin de la session de commencement, cette merveilleuse cérémonie de clôture du forum Innovafrica, au cours de laquelle foisonnent des idées de collaboration et naissent aussi par la même occasion plusieurs projets de transformation sociale.

J'inspire l'air sec de la capitale des hommes intègres, cette ville sur laquelle s'abat le parfum de l’harmattan, et je perçois une fine et imposante lueur, reflet lointain d'un espoir permis.

Je découvre peu à peu la silhouette à trait fin et précis de ce qui devient à la lumière du discours du speaker, l'idée de création du laboratoire de fabrication numérique de la ville de Ouagadougou. C'est la naissance de projet OuagaLab.

Ils ont décidé de l’appeler ainsi, le Laboratoire de Ouagadougou. Ce mot valise OuagaLab est visiblement plein d'espoir.10400039_803938132963352_1849069861396734028_n.jpg

Je décide de nourrir ma curiosité et étancher aussi ma soif de découvrir les articulations de ce projet. Je me rapproche de l'idée, elle est certes encore fraîche mais agréablement audacieuse : l'idée du premier FabLab d'Afrique de l'Ouest. L'audace de cette idée me tétanise lorsque je décide de revenir à la réalité car momentanément transporté dans le « cloud » par le rêve que suscite la session de commencement. Cette idée de Ouagalab m'arrache tout de même un beau sourire et m 'invite à croire en mon continent l'Afrique et en sa jeunesse.

L'idée de ce laboratoire numérique est portée par des jeunes, pleins d'espoir, avec le visage illuminé par le chapelet de possibilités qui s'offre à eux.

D'aucun jugerait cela d'un rêve mais Gildas Guiella et ses amis venaient de sortir de l'ombre pour faire de ce rêve une réalité. Le projet est entièrement présenté dans toute sa splendeur aux participants d'Innovafrica 2011. La silhouette que j'avais perçue est maintenant parfaitement décrite.

Le OuagaLab est née et la ferme conviction qui anime Gildas Guiella et ses amis , me fait fondre en larmes. Je comprend mieux cette citation de Koan Zen : « Ce qui te manque cherche-le dans ce que tu as ».

L'aventure du OuagaLab passe à une phase pratique. Le FabLab est hébergé pendant 3 ans au siège de l'Association Yam Pukri dans les locaux de la NTBF. Il se construit une réputation avec la mise en place de plusieurs projets tels que la mise en place d'une fraiseuse numérique, l'adoption des logiciels Libres, l’Électronique sans soudure avec Arduino et la cartographique libre sous OpenStreetMap. Gildas et ses amis hackers du OuagaLab vont développer une réelle aisance sur des projets dans le domaine de  l’énergie renouvelable matérialisée par la conception d'une éolienne avec du matériel de récupération.

10502377_804003066290192_7378667829332498097_n.jpgC'est le début de la confirmation et la naissance d'un nouveau projet aussi audacieux que l'idée de création du fablab. Gildas et ses amis viennent de décider de s'offrir un toit ! Pour réussir ce défi , ils s'adressent à la communauté via un appel à financement participatif supporté par la plateforme kissKissBankBank. Des jours passent, des appels à contribution se succèdent, le rêve est permis mais reste alimenté par le stress de ne pas réussir la mission. Tous, sont suspendus au pouvoir de la communauté.

Au matin du 21 juin 2014 , le coq chanta et comme tous les jours, le soleil se leva. Mais ce jour n’était pas un jour comme les autres. C'est à l’aube de cette journée qui semble ordinaire que l'on doit rendre publics les résultats de la campagne du crowdfunding devant permettre d'aménager et équiper les locaux du FabLab de Ouagadougou. Un projet innovant porté par une superbe équipe de jeunes Burkinabés.

Le verdict tombe, la communauté a parlé ! Ouagalab est financé à 104 % par 147 contributeurs pour un montant de 7 379 € collectés.

Encore une belle victoire ! Ouagalab , un lieu mais surtout une histoire. Une histoire qui mérite d’être racontée.

30 jours plutard, le premier mur des locaux de OuagaLab sort de terre ! On matérialise désormais le rêve et la citation de Mark Twain prend tout son sens : « ils ne savaient pas que c’était impossible donc ils l'ont fait ».

Florent YOUZAN

dimanche, juillet 27 2014

Movilab : transformer les actions en savoirs...et inversement

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Wikimedia Hackathon 2013, Amsterdam - Flickr - Sebastiaan ter Burg

Chaque jour, quelque part sur la terre, dans des territoires, des milliers d'initiatives sont portées par des citoyens dans l'objectif d’évoluer vers des modes de vie durable. Ces actions initiées localement, selon des besoins et des réalités propres aux territoires qui les accueillent, demandent pour la plupart du temps beaucoup d'investissements tant en énergie, compétences et savoirs qu'en argent. Malgré le caractère remarquable et innovant de ces initiatives, elles restent difficilement transmissibles hors de leur contexte et de leur territoire d'origine car non documentées de manière transparente.

Le besoin de se construire une méthodologie de documentation de toutes ces actions inspirantes en recette libre et accessible s'appuyant sur l'écosystème et le processus des Tiers Lieux pour être mise en œuvre localement est réel. D’où l’élaboration de la méthodologie Movilab.

A la faveur des Rencontres Mondiales des Logiciels Libres à Montpellier en Juillet 2014, Yoann Duriaux, Antoine Burret et Alban Tiberghien ont présenté les enjeux de la méthodologie Movilab.



Ci-dessous l'essentiel de leur intervention ...



Aujourd'hui, nous sommes face à plusieurs phénomènes dont ceux des gens un peu crapauds fous et ces gens ont été à l'origine des premiers tiers-lieux dont la Cantine à Paris, la Ruche, etc. Cela nous ramène aussi aux pionniers qui ont crée les laboratoires de Fabrication Numériques (FabLab), les hackerSpaces, les makerSpaces et tous les mouvements de ces espaces transversaux.

Au bout d'un certain moment, une chose nous interpelle tous. Les acteurs de ces endroits transversaux, se retrouvent en communauté, dans des îlots fermés. Es-tu maker ? Es-tu startupeur ? Es-tu hacker ? Autant de questions qui se rapprochent du profil et de l'identité des personnes qui fréquentent ces espaces.  Mais ce qui est indéniable, c'est que toutes ces personnes et tous ces espaces sont un petit bout du changement et de la mutation de notre société. Une société plus libre, plus solidaire, plus collaborative, plus open source avec des recettes et des tranches de vie accessibles à tous.


Après plus de 10 ans de parcours et partant de la fameuse fracture numérique, nous sommes arrivés à cette notion de « Tiers-Lieu ». Il est aujourd'hui important de se doter d'un outil plus puissant que les associations et les Scop car de la même manière que dans le domaine de l'informatique, le GNU/Linux fut inventé il y a 30 ans, à l'ère de la ville dite « numérique », un système d'exploitation doit aussi être crée et cela n'a rien à voir avec du code informatique.

Il est temps de travailler sur les logiques de contribution et l'incarnation de ces logiques contributives sur les territoires. On se rend compte que ces logiques sont ancestrales, et sont même déjà incarnées et le modèle français est un bel exemple. Le modèle français est basée sur la notion de biens communs. Le monde libéral est aussi basé sur la notion de biens et d’égalité entre intérêt individuel et intérêt général. Mais à un moment donné, il y a eu un bug !

Richard Stallman n'a rien inventé ! il a à un moment donné, relocalisé une pensée, celle de la société de contrôle et comment combattre dans une société de contrôle.


Avec ce bug, on constate que dans nos territoires, cela crée de plus en plus de misère et de tension sociale. La dynamique existante dans le cadre des logiciels et de la haute technologie est pérenne, elle est forte et repose sur une formule mathématique puissante.

Pour ce qui est des tiers-lieux, nous sommes dans une dimension plus forte. Pour qu'elle s'incarne , nous avons besoin de culture et la culture passe par les Hommes. Il faut arriver à faire le lien entre la technique et le social, pour créer un système socio-technique. Et le monde dans lequel nous sommes est lui même un système socio-technique et en fait le défi est d'arriver à recréer ce système socio-technique.


Avec la logique « 3 P » (Public – Private – People), nous avons les armes pour faire le « Public » et le « Private ». Les techniciens ont les armes pour le faire. Le Tiers-Lieu est représenté par le « People » et ce people est super important. Ce qui est raisonnable et plus objectif est donc d'essayer de travailler ensemble dans les tiers-lieux afin de reconstruire les territoires avec ces logiques contributives qui peuvent être constitutives dans une société.

La philosophie du Logiciel Libre s'extrapole largement dans notre modèle de société. En prenant beaucoup plus de hauteur, et avec du recul, on se rend compte très facilement que toute cette culture du Libre, des échanges, du partage et de la transparence se transporte dans n'importe quelle initiative et nous l'appliquons à 200 % dans la méthodologie MoviLab et de manière plus générale dans la POC Foundation.



Florent YOUZAN


Texte inspiré de la présentation de Yoann Duriaux, Antoine Burret et Alban Tiberghien lors des RMLL 2014

mercredi, juillet 16 2014

Réinventer le développement des territoires africains à partir des tiers-lieux (2/2)

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J'aborde dans ce billet la seconde partie de mon intervention au TedLieux qui a eu lieu pendant la quinzaine des tiers-lieux Libres et Open Source. Dans cette partie , je mets l'accès sur les innovations qui accompagnent l'aventure Jerry Do It Together en Côte d'Ivoire.

Je connais un territoire sur lequel tout le monde pensait qu'il n'y avait que des problèmes et des difficultés. Ce territoire a entamé depuis des années une transition numérique et du coup, l'on s’aperçoit que chaque problème de ce territoire pourrait être détourné en idée d'innovation. Ce territoire dont je parle,  c'est l'Afrique ! Nous nous sommes rendus compte que « chaque problème d'un africain est une idée d'entreprise. »

Les Logiciels Libres vont nous permettre de prototyper ces idées d'entreprise, que nous pourrons désormais présenter aux décideurs en leur disant : Voici des difficultés identifiées sur le territoire, voici l'idée d'entreprise qui va avec et mieux, voici le prototype qui fonctionne déjà. Nous ramenons le développement du territoire dans les tiers-lieux, tout encadrant les idées de développement des décideurs, car très souvent déconnectés des réalités que vivent les populations.

Un projet qui me tient à cœur est Bric'Espoir pour sa particularité et son empreinte locale. Bric'Espoir est un projet de financement participatif qui va permettre de bâtir l' un des plus grands tiers-lieux de la ville d'Abidjan. L'objectif de cette campagne de financement est de réunir la somme d'un milliard de Francs CFA (environ 3 millions 54 mille euros) repartie en 500 mille petites briques en ligne appelées « Bric' ». Chaque citoyen peut acheter une brique à 2.000 francs CFA et participer au financement participatif. A travers son slogan, « Construisons Ensemble », « Bric'Espoir » veut rassembler, créer et contribuer à un écosystème innovant et autonome dans le souci d'impacter le développement des territoires.

La Côte d'Ivoire va accueillir le premier Tech Hope , un Centre de Formation, d'encadrement, de promotion et de financement des idées innovantes. Ce centre offrira également des commodités pour du Coworking et servira d'incubateur pour des Startups ivoiriennes. En plus d'être une école, ce sera un véritable TechHub avec toutes les facilités technologiques et un « Laboratoire du Libre » appelé aussi « Labo Open Source ».

Un autre projet que nous avons rencontré en novembre 2011 à Ouagadougou lors du forum InnovAfrica est le projet Jerry Do It Together. Nous nous sommes toute suite dit voici un vecteur qui nous permettra d'  « imposer »  l'adoption des tiers-lieux sur nos territoires. Un Jerry est un ordinateur reconditionné dans un jerrycan (bidon) avec du matériel informatique de récupération. En Afrique, le taux de pénétration de l'outil informatique est tellement faible, que nous nous sommes dits: voici un outil qui nous permettra de mieux axer notre discours sur le développement numérique. Avec l'ordinateur Jerry, nous avons pu comprendre et tester la Formation Horizontale dans nos tiers-lieux.

Un apprenant qui arrive dans nos tiers-lieux, découvre le Jerry, apprend à reconditionner du vieux matériel informatique sur lequel il installe des applications qui répondent à des problématiques du territoire. Mais quand il sort de ce tiers-lieu éphémère, il aura le pouvoir d'organiser d'autres rencontres autour de cet ordinateur. Hier apprenant dans le tiers lieu éphémère , il devient le lendemain un formateur pour son territoire. C'est ainsi que nous avons réussi à faire adopter le Jerry en Côte d'Ivoire et dans plusieurs capitales africaines. Cet ordinateur est révolutionnaire pour nous car il a permis de comprendre que l'informatique et le numérique doivent s'adapter au territoire et répondre à une problématique concrète et propre au territoire. On a toujours dit qu'un ordinateur Jerry que nous montons dans la ville de Bouaké doit résoudre les problèmes de Bouaké. La technologie ne s'impose pas mais elle doit arriver à s'adapter au territoire qui la reçoit. Chaque ordinateur que nous montons dans nos territoires à une identité car s'inspire toujours de la question : quels problèmes allons nous résoudre ?

C'est ainsi que nous concevons l’intégration des tiers-lieux en Afrique et surtout l'apport que ces tiers-lieux peuvent offrir à la jeunesse africaine et aussi aux décideurs qui se sentent désormais obligés de descendre vers ces tiers-lieux. Ces décideurs n'ont plus le regard d'en haut mais redescendre dans ces lieux pour comprendre comment les jeunes africains réinventent le développement de l'Afrique avec un engagement participatif et dans une démarche de conscience citoyenne.



Florent YOUZAN

samedi, juillet 12 2014

Réinventer le développement des territoires africains à partir des tiers-lieux (1/2)

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Ce billet est la 1ère partie de mon intervention au TedLieux pendant la quinzaine des tiers-lieux Libres et Open Source qui a eu lieu du 07 au 18 avril 2014 à Saint-Etienne en France. Une intervention axée sur un retour d'expérience sur l"intiative Afriworkers et l'aventure Jerry en Cote d'Ivoire.

L'histoire commence tout simplement par un constat : en Côte d'Ivoire, il y a environ 5 millions de diplômés sans emploi. Ce sont 5 millions de diplômés qui n'ont jamais travaillé. Pendant que certains parents s'interrogent sur l'avenir de ces 5 millions de diplômés sans emplois, nous, nous posons un autre regard sur ce constat. Pour nous, ce sont 5 millions de compétences non utilisées et 5 millions de potentialités non exploitées.

Nous réfléchissons à une place de marché, qui est Afriworkers , qui mutualise des compétences et agrège l’expérience des jeunes africains afin qu'ils puissent postuler à des missions à l’étranger. Ces jeunes restent donc en Côte d 'Ivoire et en Afrique, ils créent une équipe agile numérique avec des compétences différentes, et postulent à des offres d'emplois et de missions à distance, disponibles en Europe, en Asie et même en Afrique.

Nous nous rendons compte qu'au delà du web, il faut permettre à ces jeunes africains de se retrouver dans un endroit pour qu'il puisse échanger et partager leur expérience mais aussi pour qu'ils puissent aussi se former.

C’est ainsi qu'Afriworkers a rapidement évolué et a pu s’établir sur la ville d'Abidjan. Mais nous nous sommes rendus compte qu'au delà d'Abidjan qui est la capitale économique, il y a aussi à l’intérieur du pays des jeunes qui sont aussi diplômés et qui n'arrivent pas à avoir du boulot. Nous commençons donc par des tiers-lieux éphémères. Nous parcourons quelques villes de la Côte d'Ivoire avec pour mission d'atteindre les endroits les plus reculés. L'objectif est d'abord de montrer qu'à plusieurs on part très loin, on devient beaucoup plus fort. Nous arrivons à postuler sur des missions très intéressantes tout en restant en Afrique.

Il faut aussi amener tous ces jeunes à pouvoir à un moment donner comprendre le concept des tiers-lieux, s'en approprier et développer en local dans leur territoire une certaine richesse. L'idée intéressante est qu'on retrouve dans ces endroits des jeunes qui viennent avec des profils différents. Lors des tiers-lieux éphémères, lorsque nous arrivons sur un territoire, nous commençons toujours par une question. Qu'est-ce que vous avez comme difficultés sur votre territoire ?

Et ce sont les jeunes qui ont l'habitude de vivre sur ce territoire qui exposent les problèmes qu'ils rencontrent au quotidien. Ils vous dirons par exemple, ici nous avons 50 % des enfants qui naissent qui ne sont pas déclarés parce qu'il est très difficile pour les populations de se déplacer jusqu'à la ville pour déclarer les nouveaux nés. Certains vous diront par exemple, ici nous avons 50 % des femmes enceintes qui n'ont jamais rencontré un seul médecin alors qu'elles sont à 8 mois de grossesse , soit par manque d'informations ou tout simplement parce que le système médicale reste encore loin.

Nous nous rendons compte que derrière ces difficultés se trouvent des idées d'entreprise qui pourraient être développées pendant ces tiers-lieux éphémères. Ces jeunes s'appuient sur ce qu'ils trouvent sur leur territoire ou ce qu'ils tutoient au quotidien. L'usage du téléphone mobile en est une parfaite  illustration. En Côte d'Ivoire et dans plusieurs pays africains, il y a plus de téléphones portables que de brosses à dent et ce sont ces mobiles qui permet à ces jeunes de prototyper leurs applications mobiles et faire passer l'idée du stade de concept au stade de prototypage. C'est ainsi que les logiciels libres vont surtout nous accompagner dans cette démarche, dans ces endroits transversaux éphémères.

Mon prochain billet présentera la 2ème partie de mon intervention avec un coup de projecteur sur une initiave locale de financement participatif d'un tiers-lieu sur Abidjan  : Bric'Espoir


Florent YOUZAN

samedi, juillet 5 2014

Les Tiers-Lieux : ces espaces de transition économique et d'exploration permanente

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La notion de Tiers-Lieu commence depuis quelques années à faire partie de notre quotidien mais elle reste tout de même méconnue du grand public . Afin de permettre aux uns et aux autres de se faire une idée de ce vaste mouvement des endroits transversaux que sont les Tiers-Lieux, j'ai souhaité revenir sur des paroles fortes prononcées par des acteurs avertis des Tiers-Lieux lors des Rencontres Ouvertes du Multimédia Citoyen et Solidaire (ROUMICS) en novembre 2013.


Comment pourrait – on definir un tiers-lieu ? Est-ce un espace de coworking, un Café, un espace dédié à l'innovation collaborative, un laboratoire d'expérimentation ?

Je dirai que c'est un peu de tout ça en même.

Mais les ROUMICS, m'ont aussi permit d'affiner ma vision de ces espaces révolutionnaires ancrés dans les territoires. Les Tiers-Lieux sont aujourd'hui une figure de l'innovation sociale. Une figure parfaitement visible car ce sont désormais à la fois des lieux physiques, des gens sur un espace physique et de l'animation sur un territoire.

Certains démarrent par un espace de coworking pur, qui peu à peu évolue vers un tiers-lieu en y ajoutant par exemple la distribution de panier, des espaces de formation, un makerSpace, un HackerSpace, un laboratoire de fabrication numérique et des espaces de rencontre pour accueillir des événements ouverts et participatifs.

Les tiers-lieux sont-ils si nouveaux que cela ? En fait, il y a toujours eu les tiers-lieux mais en ce moment nous découvrons l'impact qu'a le numérique sur les territoires via ces espaces.

Les Tiers-Lieux se définissent surtout par l’expérimentation. Ce sont des lieux de transition économique, d'exploration permanente dans lesquels plusieurs acteurs et intelligences travaillent sur la création de nouvelles valeurs différentes.

Ces espaces ont un impact très local, avec un ancrage au niveau des quartiers et de la ville. Ils sont avant tout politiques avec une profonde participation à la vie de la cité. Ils sont donc à la disposition des citoyens. On est en présence d'un 3ème champ des possibles. Le citoyen ne se limite plus à l'expression « Je vis » encore moins « Je travaille » mais désormais il mélange les deux.

On ne vient pas seulement dans ces espaces d'intelligence collective pour travailler, mais il est important de garder à l'esprit que le Tiers-Lieu est une composante du monde du travail, du territoire local en échange avec les associations, les entreprises, les collectivités, et l’ensemble des partenaires que ce soient des indépendants, des freelances, des porteurs de projets et des créateurs d'entreprises. Le Tiers-Lieu permet de reconstruire et de remailler la société avec des animations de proximité. On découvre qu'il est désormais un élément central dans la gestion de la cité en permettant de passer de l'expérimentation au changement du cœur des politiques publiques.

Au final, le Tiers-Lieu n'est qu'un outil. Il n'apporte pas la solution, il apporte juste la possibilité aux gens de s'approprier de nouveaux modèles.

Florent YOUZAN

Note : Texte inspiré des ROUMICS – Novembre 2013

mardi, mars 11 2014

Open Bistrot : l'UFR de Biosciences accueille un atelier d'installation d'Edubuntu

OpenBistrot.jpgL'ouverture de l'Open Bistrot des Universités aura lieu ce mercredi 12 mars 2014  de 09H à 12H à la salle de Conférence de l'Unité de Formation et de Recherche (UFR) de Biosciences de l'Université Félix Houphouët Boigny d'Abidjan. L'Open Bistrot est une rencontre informelle entre des citoyens et des universitaires autour de la problématique de l'adoption des logiciels libres dans l'éducation en Côte d'Ivoire. Et dans le cadre de la semaine de l'Open Education 2014 en Côte d 'Ivoire, C'est en partageant des tasses de café dans un  endroit transversal et éphémère, qui est la salle de conférence de l'UFR, que les enseignants-chercheurs et des acteurs des logiciels libres, partageront leurs connaissances , leurs expériences et leurs visions pour réussir l'intégration des logiciels libres dans l’éducation. L'objectif de cette rencontre sera aussi de susciter la naissance de plusieurs projets autour de démarches libres  et citoyennes.

Le morceau choisi pour ce premier Open Bistrot est une Install Party d'une distribution Gnu/Linux , Edubuntu , dédiée à l’éducation. Un système de tutorat sera mis en place pour permettre à chaque enseignant-chercheur qui décidera de basculer sur le système Edubuntu, d'avoir un interlocuteur sur plusieurs mois jusqu'à un transfert total de compétence. Le Jerry Do-It-Together sera aussi en attraction à cette rencontre, car il servira de système libre de gestion automatisée du choix des tuteurs par SMS.

Il faut signaler pour finir que cette rencontre est une initiative du Laboratoire de Neurosciences de l'UFR de Biosciences de l'Université FHB avec la collaboration de l’Association Ivoirienne pour l’Intégration des TIC en Éducation (AIITICE) et l’Association Ivoirienne pour Linux et les Logiciels Libres (AI3L).


Florent YOUZAN

jeudi, mars 6 2014

Des laboratoires à domicile à partir des logiciels libres.

1964744_4053582194467_1224151754_n.jpgLa formation pratique a toujours été une valeur essentielle dans l'apprentissage et malheureusement certains jeunes en Afrique se voient écartés de cette démarche par manque d’équipements et de salles spécialisées. Ils sont donc exclus d'une bonne partie du savoir pendant leur formation,  parce qu'ils ne disposent pas de logiciels accessibles ni d'infrastructures adaptées.

Même, lorsque certains instituts mettent des salles spécialisées à leur disposition, ces jeunes ne peuvent pas continuer l’approfondissement de leur formation chez eux à domicile où ils disposent de beaucoup plus de temps. La raison est simple, ils ne disposent pas chez eux à domicile , de logiciels sur lesquels ils sont formés car hors de prix et aussi parce qu'ils ne peuvent pas s'offrir des ordinateurs neufs sur lesquels sont sensés tourner ces logiciels là !

Ce mal, il est réel et l'Afrique le vit au quotidien, loin des bureaux climatisés où se conçoivent les grosses théories des plans stratégiques de développement de la formation.

Que faire ? Certains jeunes, ont décidé de prendre en main leurs formations à travers des solutions libres et à faible coût. Ils font de la récupération de vieux matériels informatiques qu'ils reconditionnent pour obtenir des ordinateurs sur lesquels ils installent des systèmes et logiciels libres. Ils montent ainsi de petits laboratoires d'expérimentation chez eux à domicile. 

Afin d'inciter la grande majorité de la jeunesse africaine à épouser cette démarche que je trouve vraiment constructive, j'ai décidé de rencontrer deux jeunes ivoiriens qui ont chez eux à domicile des modèles de ces petits laboratoires libres. Emmanuel et Serge sont deux étudiants en fin de cycle, et ils ont en commun la passion  pour les logiciels libres. Voici leur témoignage : «mon laboratoire libre à domicile est constitué d'un vieux ordinateur, d'un point d'accès wifi, de deux vieux téléphones IP et USB. Tout ce matériel provient de la récupération et de quelques achats effectués à la casse informatique de Marcory, une commune de la ville d’Abidjan. Ce petit laboratoire que j'ai constitué, tourne essentiellement avec des systèmes libres et me permet d'expérimenter des services telecoms notamment des services basés sur la voix et les SMS (short message service). Nous nous retrouvons chaque week-end entre amis pour des formations sur les logiciels libres comme par exemple : Kannel, Astérisk, SmsTools, Drupal, Chilispot, FreeRadius, OpenStreetmap et très bientôt Arduino car nous venons de commander des cartes d’électronique ouverte. Nous avons développé dans ce laboratoire, une plate-forme de gestion des dédicaces et informations pour le compte de la radio BASSAM FM. Ce système de dédicaces fonctionne par SMS et tourne sur une distribution GNU/Linux. Nous avons aussi mis en place un système de SMS marketing qui tourne en ce moment sur les 3 sites d'une université privée », explique Emmanuel.

Serge quant à lui,  il insiste sur l'avantage du reconditionnement. Une belle pratique qui est à 986593_4053582714480_681560775_n.jpgl'origine de son laboratoire : «mon laboratoire est 100 % libre et basé essentiellement sur de la récupération. J'ai ensuite reconditionné le matériel récupéré dans un bidon de 20 libres pour en faire un Jerry Do-It-Together. En plus du Jerry,  j'ai aussi dans mon labo, une clé internet 3G, quelques équipements réseaux et des téléphones IP (VoIP : Voice Over IP). La mise en place m'a coûté 0Fcfa sinon je dirai juste mon énergie et mon temps. Ce laboratoire m'a permis d’élaborer des projets d'école et m’accompagne aujourd'hui dans mes recherches complémentaires. Depuis la fin de mon cycle d’ingénieur en informatique, j'utilise mon laboratoire pour concevoir et tester des solutions basées sur des logiciels libres pour le compte de certaines entreprises de la place. Je n’oublie pas aussi les projets communautaires qui ont pu voir le jour après plusieurs nuits blanches et là, je pense à une application SMS qui a permis de diffuser en temps réel le programme de chaque journée pendant le forum  InnovAfrica qui s'est tenu à Abidjan en novembre 2013. »

Voici deux témoignages qui me parlent personnellement et qui représentent pour moi des valeurs qu'offrent les logiciels libres, rendant aujourd'hui simple ce qui était autrefois un mystère.

Florent YOUZAN