Cet article est le
dernier de ma série de 4 billets, qui expliquent comment les
africains pourraient détourner leurs problèmes en idées
d'entreprise. Aujourd’hui je traite du covoiturage à
l'ivoirienne, une autre manière de mettre en avant la consommation
collaborative dans le transport, afin d'apporter un élément de
réponse aux problèmes de transport que vivent les abidjanais !
Abidjan, la capitale
économique de la Côte d’Ivoire, est confrontée à d'énormes
difficultés de transport à cause du manque de moyens de transport en commun à
moindre coût et des embouteillages aux heures de pointe.
Certains abidjanais s'organisent comme ils le peuvent pour s'offrir
des conditions de transport acceptables en mutualisant les dépenses.
Ils trouvent le moyen de se mettre à 3 ou 4 de manière informelle
et spontanée, pour prendre un taxi et partager les frais de
transport.
Cette pratique
informelle qui fonctionnent tant bien que mal est déjà un élément de solution. Il suffit maintenant de bien l'organiser en
mettant à la disposition des abidjanais un site web, une application
mobile (android, windows phone, ios, blackberry, ...), un réseau social et une plate forme SMS, à partir desquels, n’importe quel citoyen
pourrait indiquer son trajet et l’heure probable de son départ. Le
système le mettra en
relation avec tous ceux qui se retrouvent dans la même zone que lui et qui
aurait la même destination à l'heure indiquée. Ils pourraient
ainsi être mis en contact lorsque le nombre de passagers sera
atteint.
Ce système
d'utilisation conjointe et organisée d'un véhicule et de partage de
trajet , avec un conducteur non professionnel et plusieurs passagers
s'appelle le covoiturage. En Côte d'Ivoire, ce principe pourrait
avoir une déclinaison avec les taxis qui à la différence sont
dotés d'un chauffeur professionnel. Ils pourrait ainsi renforcer les
véhicules de particuliers dans le système naturel du covoiturage !
Les taxis pourraient
intégrer le système d’alertes et en fonction de la situation
géographique du taxi qui s’est préalablement abonné sur la
plateforme, le chauffeur est alerté par SMS pour un trajet avec les
contacts de l’initiateur du covoiturage. Ainsi, les taxis pourront
désormais rouler utiles et aussi les usagers pourront bénéficier
d’un système plus organisé, avec des automatismes.
Le même système
fonctionnerait très bien avec des voitures de particuliers. Un
abidjanais qui a l’habitude de faire son trajet tout seul, pourrait
désormais le faire avec d’autres citoyens qui pratiquent le même
trajet que lui. Il pourrait ainsi solliciter un appel à partager son
véhicule sur la plateforme à partir de l’application mobile, du
site web ou de l'application SMS, en indiquant le lieu de ralliement,
le trajet, la destination et l’heure de départ. D’autres
utilisateurs du système, qui recherchent des possibilités de
covoiturage sur le même trajet seront aussitôt alertés. Ils
pourront partager les frais du carburant selon une démarche
collaborative. Mais, il est important de préciser que l’objectif du
covoiturage n’est pas de faire un quelconque bénéfice, mais
simplement de mutualiser les coûts du transport (soit le prix du
taxi ou le coût du carburant).
Cette plateforme de
covoiturage pourrait être renforcée par la mise en place d'un
réseau social des voisins de quartier, dont le rôle sera de mettre
en relation des habitants d'un même quartier qui auraient beaucoup
de choses à partager dont par exemple leurs voitures. Ainsi, tous les
habitants d'un quartier qui se retrouvent sur ce réseau social peuvent
exprimer leurs besoins ou présenter ce qu'ils souhaiteraient partager
avec les autres. Par exemple, un voisin peut mettre son profil à
jour en indiquant qu'il pourrait mettre son véhicule en covoiturage
pour ceux qui en auraient besoin.
Je pense aussi à des
groupes de 4 voisins, qui pourraient se créer via le réseau social.
Je m'explique rapidement ! Des voisins ayant tous des voitures peuvent
décider de créer un groupe à partir du réseau social des voisins
de quartier. Ils pourront établir un programme tournant d'utilisation du véhicule
de chacun d'entre-eux. Chaque matin, ils recevront des
alertes SMS indiquant l'heure de départ et la voiture à utiliser.
Ce système permettra de faire des économies sur le transport, sur
le carburant et de permettre à chaque voiture de rester au repos au
moins 3 jours dans la semaine. Cette utilisation de
véhicule à 4, permettra surement de décongeler les routes asphyxiées
par des bouchons sans noms.
Le problème du
transport à Abidjan est aussi dû aux nombreux embouteillages qui
fleurissent malheureusement dans chaque commune. Dans une étude que
j’avais effectué, il a environ 2 ans dans le cadre du
télétravail, il a été révélé que chaque abidjanais perdait en
moyenne 2 heures par jour dans les embouteilles sur le trajet
domicile-bureau et bureau-domicile. C'est à dire 20 jours que les
abidjanais perdent chaque année assis dans les embouteillages à ne
rien faire. 20 jours précieux de notre temps de vie !
Une solution serait de
développer le transport lagunaire qui selon moi n'est pas
suffisamment exploité. En général, la traversée de la lagune ne
dure que 5 minutes. Des zones peuvent être dégagées et
transformées en parking payant où tous ceux qui veulent emprunter
les bateaux bus, ou tout autre moyen de transport lagunaire
pourraient stationner leur véhicule et ainsi se rendre
tranquillement au boulot. Les réservations de places sur le parking
payant peuvent se faire à partir d'une application mobile ou SMS ou
simplement depuis un site web avec des moyens de paiement mobile, ou de SMS surtaxés, pour éviter
les files d'attente. Tous ceux qui décideront de s'abonner au
transport lagunaire pourront bénéficier d'un programme détaillé et
des alertes SMS en temps réel sur les heures d'embarquements.
Pour finir, il serait
intéressant que nous parlons de la rentabilité d'un tel système.
Des pistes non négligeables sont le téléchargement payant des
applications mobiles utilisées pour ce projet de covoiturage et les
abonnements des utilisateurs et des taxis. Les SMS générés seront
des SMS+ (SMS surtaxés) avec possibilité d’abonnement mensuel. Le
réseau social pourra générer des revenus avec de la publicité et les liens sponsorisés. Je pense même à un
excellent système de geo-marketing à mettre en place pour faire de
la publicité de proximité et ciblée. En fait le réseau social des
voisins de quartier saura localiser chaque membre et pourrait lui
proposer des publicités de boutiques de quartier, de restaurants,
de wifi-café, des super-marché du quartier ou de petites affaires en fonction de la rue.
Je finis ainsi ma
série de 4 billets sur le détournement des problèmes des africains
en idées d'entreprise. Vous avez certainement parcouru ces billets
en même temps que moi mais il se pourrait que nous ne soyons pas
arrivés à la même conclusion. La mienne est très simple :
Chaque problème d'un africain est une idée
d'entreprise. Comme le dit un proverbe chinois, « le
meilleur moment pour planter un arbre c’était il y a 20 ans. Et le
deuxième meilleur moment c'est aujourd'hui ». C'est une
invitation à l'action, maintenant et selon notre inspiration. Quand
l’inspiration vient, il faut se mettre en mouvement car l'inspiration
à une date de péremption !
Pour résumer ces 4 billets, je citerai Stephen Covey : « La
façon dont nous voyons le problème est le problème » !
Florent
YOUZAN
Reférences
Crédit Photo : www.lebabi.net